Le borzoï, un magnifique chien racé, emblématique de la Russie
Le borzoï (ou barzoï, conformément à la prononciation) ou lévrier russe (rousskaïa psovaïa borzaïa [sobaka] – borzaïa, féminin de borzoï, signifiant « véloce ») est une race canine originaire de Russie.
C'est un très beau lévrier, grand, élancé, élégant, à l'allure aristocratique. Il a une conformation harmonieuse, une taille imposante, une fourrure riche et belle en couleurs, des proportions équilibrées et des mouvements gracieux ; il dégage une indéniable noblesse.
Bien entraîné, il est rapide et endurant à la course mais ne dépasse pas 55 km/h en pointe. Il peut être dangereux au combat car il est puissant et courageux.
Les origines du borzoï sont lointaines et controversées.
Il serait issu de croisements entre différents lévriers asiatiques (à l'origine sloughi / tazy) et le laïka, chien de type spitz, à poils longs, originaire de Russie septentrionale, utilisé notamment pour la chasse et le trait. D'autres croisements sont sans doute intervenus par la suite. Par ailleurs, en l'état actuel des connaissances, on ne saurait exclure la possibilité d'une origine directement liée à la faune sauvage. En tout état de cause, la sélection opérée par les éleveurs a abouti à la création d'une race plus ou moins homogène, dès la fin du XVIIIe siècle.
La première mention d'un lévrier russe en France date du début du XIe siècle. Selon une chronique, Anne de Kiev, fille de Iaroslav le Sage, grand-prince de Kiev, qui épousa en secondes noces le roi Henri Ier, était escortée de trois lévriers : un noir, un gris et un fauve. Elle aimait, nous dit-on, beaucoup chasser à courre.
On sait également qu'en 1519, le roi du Danemark, Christian II, offrit à François Ier, roi de France, des lévriers de race russe, ramenés de Moscovie.
Dans son Rerum moscoviticarum commentarii (Commentaires sur les affaires moscovites), publié en 1549, le baron Sigismund von Herberstein, ambassadeur de l'empereur Maximilien Ier auprès du grand-prince Vassili III de Moscou, a décrit une chasse grand-ducale à laquelle il assista en qualité d'invité. Cette chasse se déroulait de la manière suivante : des rabatteurs battaient les bouquets d'arbres et les broussailles pour en faire sortir les lièvres et lorsque ceux-ci apparaissaient à découvert, les chasseurs postés alentour lâchaient leurs lévriers. Selon Artem Boldarev, lui-même propriétaire d'une célèbre meute et grand connaisseur de la race, « c'était bien avec des borzoïs que chassait le grand-prince Vassili III. Il existe une miniature de missel où il est représenté allant en pèlerinage, assis dans un traîneau et suivi de son écuyer de chasse menant en laisse sa svora composée de trois borzoïs. Ceux-ci sont très reconnaissables à leur museau allongé, à leur long poil et à leur queue en forme de faucille. ».
La première description connue d'un lévrier russe à poil dense date de1635. Elle se trouve dans un ouvrage intitulé Les règles de la chasse avec le lévrier à poil long, rédigé par Christian von Lessing, de Riga.
Au XVIIIe siècle, la chasse à courre atteint son âge d'or en Russie. La plupart des membres de la dynastie des Romanov (fondée en 1613) et de la noblesse terrienne russe ont, de tout temps, aimé et assidûment pratiqué la chasse à courre, avec des borzoïs, voire d'autres lévriers, et des chiens courants. Cette forme de chasse est unique en son genre : elle implique une meute de chiens courants et une meute de borzoïs. Lancée dans les sous-bois par les veneurs à cheval, la meute de chiens courants rabat le gibier en terrain découvert, en direction des borzoïs postés à distance. Les chasseurs à cheval mènent les borzoïs en svora de deux ou trois (le mot svora désigne aussi bien le couple ou le trio de chiens que la longue lanière de cuir qui les retient). Aussitôt libérés à la vue du gibier, les borzoïs doivent le rattraper pour le tuer ou l’immobiliser. Qu'ils chassent par goût ou par tradition, les Russes entretiennent alors des équipages fastueux. À l'exemple d'un certain Samsonov, à Smolensk, qui possède un millier de chiens et, nous dit-on, ne manque jamais d'ajouter les mots « premier chasseur de Russie » après sa signature. Le borzoï est élevé en meutes bien distinctes (couleurs de robes, nature du poil, formes de têtes, tailles, etc.) selon les goûts respectifs des chasseurs. On l’utilise pour la chasse au lièvre, au renard mais aussi au loup, au cerf ou au sanglier.
L'abondante iconographie picturale disponible dès le XIXe siècle atteste que la race est désormais à son point culminant, même dans la diversité de ses types. Mais l'abolition du servage de 1861 lui porte un premier coup presque fatal. Les propriétaires terriens perdent une importante main-d'œuvre gratuite.
« Les neuf-dixièmes des équipages de chasse sont liquidés », écrit Artem Boldarev. Pourtant, il en reste encore un grand nombre.
À partir des années 1870, le borzoï se dissémine peu à peu dans le monde entier. On commence à le connaître en Angleterre, en France, en Amérique et ailleurs. Toutefois, la morphologie de certains individus donne matière à discussion. Les types sont très variables, souvent abâtardis. En Russie, quelques éleveurs se mobilisent pour tenter de sauver la race, à l'aide des dernières meutes disparates qui existent encore. En 1873, et à l'initiative du comte V. A. Cheremetiev, ils fondent l'Association impériale pour la propagation des chiens de chasse et la réglementation de la chasse. Celle-ci organise des expositions et des épreuves de courre en champ clos.
En 1887, le grand-duc Nicolaï Nicolaïevitch Romanov (1856 – 1929) crée sa propre chasse, sur le domaine de Perchino (province de Toula). Sa meute restera la plus célèbre et sans doute la plus belle parmi toutes les autres dont l'histoire a retenu le nom. Nicolaï Nicolaïevitch était non seulement un grand militaire de carrière mais aussi un chasseur passionné et un éleveur avisé. On peut par ailleurs admettre que, s'agissant de ses équipages de chasse, il prenait volontiers conseil auprès de son intendant, Dmitri Valtsov, auteur d'un ouvrage de référence, consacré à Perchino (La chasse de Perchino), publié en Russie, en 1913.
Malheureusement, la révolution russe de 1917 va quasiment anéantir le borzoï dans son pays d'origine. Par chance, les nombreux individus exportés précédemment – en particulier de Perchino – dans plusieurs pays d’Europe et même aux États-Unis permettront de sauver la race.
Une chasse russe (A. Kivchenko)
Le borzoï Boris du dessin animé de Disney La belle et le clochard (1955). Boris est un chien philosophe, citant Gorki pour rassurer le cocker sur son sort : « Malheureux doit trouver plus malheureux que lui, ensuite lui très heureux. Fin de citation ».